Les autorités algériennes envisagent de réformer la loi minière afin de stimuler l’investissement dans le secteur, diversifier l’économie et répondre aux défis environnementaux et sociaux liés à l’exploitation des ressources minières. Bien que cette initiative soit louable, plusieurs aspects de la nouvelle loi méritent une analyse critique pour s’assurer qu’elle atteigne ses objectifs tout en évitant les écueils potentiels. Tout ce qui vient d’être dit ci-dessus est vrai pour un pays ou les autorités veulent développer leur pays. Cependant, il est légitime de se poser la question pourquoi c’est maintenant (le timing) que celles-ci se sont réveillées pour dépoussiérer la loi minière. Les dessous de cette réforme nous viennent de Washington ou l’ancien ministre des affaires étrangère et actuel ambassadeur d’Algérie aux états unis M. Boukadoum voyant les américains discuter avec les ukrainiens à propos des terres rares, une opportunité pour les autorités algériennes de se rapprocher de Washington car déçu par les Russes sur plusieurs dossiers (adhésion aux Brics, l’absence de soutien au dossier du Sahara occidentale, la présence des Wagners aux sahel,…) et de leur proposer les terres rares algériennes dans un pays qui ne soit pas en guerre. Après plusieurs contacts avec les hauts responsables américains, il est devenu évident qu’aucun investisseur ne va s’aventurer sous l’ancienne loi minière dès lors, une réforme s’impose. Pour cela une loi a été rédigée et présentée à l’assemblée nationale le matin du 16 juin 2025 et votée l’après midi du même jour. Une loi qui engage le sous-sol d’un pays non seulement de la génération actuelle mais aussi celle des générations futures qui est traitée de cette manière ne peut être qualifiée que de scélérate. L’examen de cette loi fait ressortir des points qui sont présentés comme positifs mais surtout beaucoup de points négatifs que nous allons discuter ci-dessous avec des propositions d’amélioration.
Points Positifs de la Nouvelle Loi minière
- Attractivité pour les Investisseurs
La nouvelle loi propose des incitations fiscales et douanières pour attirer les investisseurs étrangers et locaux. Cela pourrait effectivement stimuler l’exploration et l’exploitation des ressources minières, notamment dans les zones sous-exploitées. En outre, la simplification des procédures administratives pour l’octroi des permis est un pas dans la bonne direction, car elle réduit les délais et les coûts pour les entreprises.
- Focus sur la Transparence
L’introduction d’un registre public des contrats miniers est une mesure importante pour promouvoir la transparence et lutter contre la corruption. Cela aligne l’Algérie avec les standards internationaux, notamment ceux de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE). Le renforcement des mécanismes de contrôle et de suivi est également un point positif pour assurer une gestion équitable des ressources. Cependant, ce point doit être nuancé car la corruption en Algérie sévit en fléau et elle est systémique et le classement de l’Algérie par l’organisation transparency international (107 sur 180 pays) ne fait que confirmer ce qui est déjà connu.
3. Protection de l’Environnement
L’obligation de réaliser des études d’impact environnemental (EIE) avant le démarrage des projets miniers est une avancée significative. Cela permettra de minimiser les impacts écologiques et de mieux planifier la réhabilitation des sites après l’exploitation. La création d’un fonds pour la restauration des zones minières abandonnées est une mesure proactive pour gérer les impacts à long terme.
Points Négatifs et Risques Potentiels
- Manque de Clarté sur les Redevances et les Retombées Économiques
Bien que la loi prévoit des incitations fiscales, elle ne précise pas suffisamment comment les redevances minières seront calculées et redistribuées. Il existe un risque que les retombées économiques ne bénéficient pas suffisamment à l’État et aux communautés locales. Dès lors, une clarification est nécessaire sur la manière dont les revenus miniers seront utilisés pour soutenir le développement local et national.
- Faible Implication des Communautés Locales
Malgré que la loi mentionne la consultation des communautés locales, elle ne prévoit pas de mécanismes concrets pour garantir leur participation active dans les décisions concernant les projets miniers. A cet égard, il manque également des dispositions claires sur la redistribution des bénéfices aux populations locales, ce qui pourrait entraîner des tensions sociales et des conflits.
3. Risque de Surexploitation et de Non-Respect des Normes Environnementales
Bien que des études d’impact environnemental soient prévues, il n’y a pas de garantie que les entreprises respecteront les normes environnementales une fois les projets approuvés. En outre, les mécanismes de contrôle et de sanction en cas de non-respect des normes ne sont pas suffisamment détaillés, ce qui pourrait conduire à des abus et à une dégradation de l’environnement.
4. Dépendance aux Investissements Étrangers
La nouvelle loi semble fortement axée sur l’attraction des investissements étrangers, ce qui pourrait exposer l’Algérie à une dépendance excessive vis-à-vis des capitaux internationaux. Cependant, il est crucial de veiller à ce que les entreprises étrangères ne dominent pas le secteur au détriment des acteurs locaux, et que les technologies et compétences soient transférées pour renforcer les capacités nationales.
5. Absence de Stratégie pour les Petits Exploitants
La loi ne prévoit pas de mesures spécifiques pour encadrer et soutenir les petits exploitants miniers, qui jouent pourtant un rôle important dans l’économie locale. Sans un cadre réglementaire adapté, ces acteurs risquent de rester dans l’informalité, avec des impacts négatifs sur l’environnement et les conditions de travail.
Recommandations pour Améliorer la Loi
- Clarifier les Mécanismes de Redistribution des Revenus
Il est essentiel de définir clairement comment les redevances minières seront redistribuées entre l’État, les régions et les communautés locales. Cela pourrait inclure la création d’un fonds de développement local pour financer des projets d’infrastructure, d’éducation et de santé.
- Renforcer la Participation des Communautés Locales
La loi devrait inclure des mécanismes obligatoires pour la consultation et la participation des communautés locales dans les décisions concernant les projets miniers. En plus, des clauses spécifiques devraient être ajoutées pour garantir que les populations locales bénéficient des retombées économiques, notamment en termes d’emploi et de formation.
- Mettre en Place des Mécanismes de Contrôle et de Sanction
Il est crucial de renforcer les capacités des institutions de contrôle pour surveiller le respect des normes environnementales et sociales. A cet égard, des sanctions strictes devraient être prévues en cas de non-respect des obligations, y compris des amendes et la suspension des permis.
- Encadrer et Soutenir les Petits Exploitants
La loi devrait inclure des mesures pour régulariser et soutenir les petits exploitants miniers, notamment par des formations, des incitations fiscales et un accès facilité aux équipements. Cela permettrait de réduire l’informalité et d’améliorer les conditions de travail et les impacts environnementaux.
5. Équilibrer les Investissements Étrangers et Locaux
Il est important de veiller à ce que les investissements étrangers ne dominent pas le secteur au détriment des acteurs locaux. La loi devrait encourager les partenariats entre entreprises étrangères et locales pour favoriser le transfert de technologies et de compétences.
Conclusion
La nouvelle loi minière algérienne représente une opportunité importante pour stimuler l’économie et moderniser le secteur minier. Cependant, elle présente plusieurs lacunes qui pourraient limiter son efficacité et entraîner des impacts négatifs sur l’environnement et les communautés locales. Pour maximiser les bénéfices de cette réforme, il est essentiel de clarifier les mécanismes de redistribution des revenus, renforcer la participation des communautés locales, et mettre en place des mécanismes de contrôle et de sanction robustes. En intégrant ces recommandations, l’Algérie pourrait se positionner comme un leader régional dans la gestion durable et équitable de ses ressources minières.